Les instructions de navigation préconisent
d'attendre dans un des ports du Nord (l'Aber Wrac'h, l'aber Ildut ou Portsall...)
que l'heure soit idéale pour embouquer le chenal. Les conditions que
nous avions (voir ci dessus) m'ont fait préférer l'option de prendre
le chenal quand même, quitte à ne pas aller très vite.
Quand on regarde les entrées des ports abris
qui permettent d'attendre l'heure favorable on voit de suite que ça
ne ressemble pas à la passe W de la rade de Cherbourg. C'est plein de
pavasse vicieuses. Quand il fait jour, par temps clair, on fait du
pilotage, on surveille les alignements, ça le fait bien... Mais de
nuit avec une brume à couper au couteau, même avec un GPS, je ne le
sentais pas. Les risques d'embouquer le chenal du Four me semblait
moins importants que ceux de rentrer dans ces conditions, juste pour
quelques heures, dans un de ces abris.
Les risques et désagréments du
passage du Four :
- Le vent contre le courant qui peut lever une mer
très difficile.
- La présence de nombreuses tête de roches et îlots en bordure du
chenal.
- L'étroitesse du chenal qui empêche de tirer des bords.
- Une relativement grande longueur (surtout en avançant contre le
courant)
- Dans le sens Nord-Sud on a 4:30 h de courant favorable contre
7:30 h de courant défavorable.
L'horaire idéal pour le passage du
Nord au Sud :
Se trouver à la bouée du Libenter à l'entrée de l'Aber
Wrac'h une heure après la pleine mer de Brest. Piquer le plus vite possible
en profitant de la renverse vers le phare du Four et poursuivre d'une traite
jusque la pointe Saint Matthieu car on ne dispose que d'un bon 4:00 h pour
le trajet.
Sans vent, il vaut mieux avoir un bon moteur.
Comment on a fait :
Il n'y aura pas beaucoup de photo pour illustrer la
chose car, comme on l'a dit, c'était la nuit dans le brouillard.
Nous avons pris la décision de poursuivre vers le
chenal autour de la position 48°45N - 4°35W. Nous étions alors à moins
de 7 milles au Nord du phare de l'île Vierge qui était complètement
invisible. Ce qui me troublait c'est que ce phare porte au moins à 4 fois
cette distance. Ça promettait pour trouver les fanaux et autres perches dans
les abers ou les roches de Portsall.
De là on a suivi une route au 225° pendant 18,5 milles pour éviter la chaussée de Portsall.
Nous visions le point de route : 48°32,5'N - 4°55'W. Au passage, nous avons
aperçu et entendu sur notre bâbord la cardinale W "la grande Basse de
Portsall".
On ne peut pas
résister à l'envie d'arrondir la route au fur et à mesure pour raccourcir
les distances. On a donc fini par se retrouver sur l'alignement du chenal :
Cap au 158° pour aligner le phare de Kermorvan (feu à un éclat blanc 5
secondes 20 M) et celui de la pointe Saint
Mathieu ( feu à un éclat blanc 5 secondes 29 M). Pour le moment c'est au GPS qu'on se maintient sur cette ligne
invisible qui permet d'éviter les hauts fonds de part et d'autre du chenal.
Pour cela on a rentré dans le GPS les coordonnées du phare de la pointe
Saint Mathieu : 48°19,8'N - 4°46,3W et on reste vigilant, l'oeil sur
l'instrument. On arrive pile poil sur la bouée Valbelle (48°26,5'N -
4°50,0'W) qu'on laisse à bâbord. On voit la tourelle à bandes obliques
blanches et noirs des Platresses dont nous ne nous approchons pas. On
continue sur l'alignement qui est maintenant visible. Les deux phares
portent loin et le temps s'est un peu éclairci.
Quand on arrive à proximité de la presqu'île de
Kermorvan, l'alignement est fini et on suit la côte. On passe entre la
tourelle de la Vinotière (48°22'N - 4°48,5W) et le phare blanc de Kermorvan
(48°21,7'N - 4°47,3'W). On passe devant l'entrée du port du Conquet.

On arrive devant la Pointe Saint Matthieu qui est
reconnaissable à partir de notre photo. Ça y est on en est presque sorti.

Il reste la tourelle rouge des vieux Moines (48°19,4'N
- 4°66,5'W) à laisser sur bâbord avant de piquer vers Camaret ou nous
mouillerons, mangerons et ferons une petite sieste bien méritée.
Certes on a lutté au moteur contre le courant pendant
une trentaine de milles on a peut-être mis quatre ou cinq heures de plus que
dans les bonnes conditions. Si nous nous étions arrêté, on serait arrivé
encore plus tard à Camaret. Et quelques heures de moteur ce n'est pas cher payé les
risques évités en n'essayant pas de rentrer dans un des ports-abris sans
aucune visibilité.