Cahier N° 117

 

 

Nous profitons de cette escale très sympathique où les habitants nous ont accueillis comme des amis pour vous faire découvrir, au travers de deux cahiers consécutifs, quelques particularités de la vie des Ni-van qu'ils nous ont demandé de partager avec eux. Voici le premier de ces deux cahiers et vous pourrez bientôt préparer le Kava à la traditionnelle... (si vous y tenez vraiment).

 

 

Découverte:  Batnavni sur l'île de Pentecôte au Vanuatu.

Voir la carte du Vanuatu

Nous devons oublier "Onga mo" qui veut dire "bonjour" dans le Sud de l'île de Pentecôte et nous allons apprendre "Ren mamak" qui veut dire la même chose dans la partie centrale. Il y a une douzaine de dialectes rien que sur cette île.

 

Infos nautiques:

Encore une navigation très facile en longeant la cote sans danger depuis le village de Wali (en bas de la carte de gauche) jusqu'au village de Batnavni (en haut de la carte de droite).

Nous avions hissé la grand voile mais une bonne partie de cette navigation de 16 milles s'est faite au  moteur car nous étions à l'abri du vent dominant d'Est derrière la chaine de moyenne montagne qui est l'épine dorsale de l'île de Pentecôte.

Nous avons jeté l'ancre dans 5 mètres d'eau sur un fond de sable en face du village qui est à peine visible, caché derrière les grands arbres. Nous apercevons de loin une belle plage coupée par la sortie d'une petite rivière. C'est son eau douce et inépuisable qui a du décider les anciens à installer leurs cases à cet endroit.

Les prévisions météos n'indiquaient aucun changement dans la situation d'alizé d'Est. Il n'y a pas de voilier dans les parages, peu remontent jusque là et la baie très ouverte n'offre un abri que par beau temps.

 

 

 
     
 

Télécharger nos traces de navigation:

Télécharger les fichiers "Traces"  qui peuvent ensuite être utilisés avec un logiciel comme Open CPN.
(Explications sur le téléchargement à la fin de la page "carte du Vanuatu")

Cliquez ici pour charger la trace permettant d'arriver à Batnavni. Vous voyez qu'il ne faut pas se fier à la carte car selon elle nous avons mouillé à l'intérieur des terres à  la position: 15°39,9' S - 168°07,11' E.


Banik au mouillage dans la baie de Batnavni devant le village..

  Nous apportions un cadeau pour le chef Alan de la part de nos amis du voilier Borgnefesse qui étaient encore à Nouméa à notre départ de Nouvelle Calédonie. A notre arrivée au village, nous apprenons que le chef Alan est décédé il y  a quelques mois. C'est sa veuve Rolenas et son dernier fils Frédérick  (Assis au centre)qui nous reçoivent pour faire la coutume, entourés de nombreux membres de la famille Tobi.

Cette famille a été d'une grande gentillesse avec nous, elle avait du plaisir à nous expliquer la vie et les traditions des ni-vans.
 

 

 

Rendez vous avec les potes!

  Le nakamal de Batnavni est une case en lisière du village. C'est là que les hommes qui ont eu une rude journée viennent se détendre le soir en buvant ensemble un petit coup. C'est le bistrot du coin en quelque sorte.

La boisson traditionnelle dans toute la Mélanésie est le kava. Aux Fiji et au Vanuatu, ils en préparent tous les jours et le dégustent dans l'obscurité et la tranquillité du nakamal qui a un rôle social important étant le lieu où les gens se retrouvent. Ce sont souvent des hommes. Il y a peu de femmes, quand elles ne sont pas purement interdites de séjour comme sur l'île de Tana.

     

C'est Tony qui prépare le kava aujourd'hui, pour les hommes du village et aussi pour les invités que nous sommes.
Il détache les racines fraichement coupées et secoue la terre qui les entoure.
 
Après avoir sommairement nettoyé les racines dans un seau d'eau claire, il les fourre dans le mortier creusé dans une pierre pour les écraser au pilon. Dans bien des endroits au Vanuatu, ceux sont encore les jeunes garçons qui broient les racines en les mâchant. Puis ils recrachent la bouillie pour la suite de la préparation. C'est pour cela que j'ai absolument voulu voir comment ils procèdent ici.
     

Les racines broyées sont extraites du mortier... Tony est ravi, c'est une bonne mouture.
 
La suite des opérations se déroule à l'intérieur du nakamal. Le sol est en terre battue. Tony  dépose la pâte sur un plateau en bois. Ce plateau est traditionnel, on le trouve dans toutes les maisons, il sert aussi bien à cuisiner qu'à poser le bébé pour lui laver le derrière... En fait, ça sert de table.
     

Après avoir puisé un peu d'eau dans le seau, Tony malaxe les racines broyées. Je reconnais le pot d'une couleur douteuse. C'est un ancien pot de confiture reconverti pour l'usage...
 
Une partie de la pâte obtenue est placée dans un linge.../...
     

.../...Puis Tony presse le tout pour extraire le jus qui lui coule entre les doigts. On procède aussi ainsi pour obtenir le lait de coco à partir de la pulpe râpée.
A tiens, maintenant je sais à quoi sert " l'ex pot de confiture"... Quand à la demi bouteille en plastique, c'est pour puiser l'eau claire dans le seau.
 
En deux gestes, Tony fabrique une petite passoire avec de la fibre végétale qu'il tortillone. Le jus laiteux et terreux est donc débarrassé de la plupart des morceaux.
     

Tout a été  bien filtré. Tony récolte suffisamment de jus pour remplir à ras bord " l'ex pot de confiture". Il n'y a plus qu'à servir dans un gobelet bleu. Gobelet bien propre car il a été soigneusement lavé pour les invités...
 
-  "Qui veux gouter?

-  "Allez donne moi un gobelet, je vais faire honneur...
Et Geneviève aussi elle en veut un."

     

Normalement il faut tout boire d'un trait...    Silence...
 
Encore silence...
     

-  "C'est bizarre tu ne trouves pas ?"
 
-  "Il n'y en a pas beaucoup, on  ne va pas tout boire... Ca ne serait pas gentil, tenez prenez nos verres..."
     

-  "Ouaip, fameux le kava aujourd'hui."
-  "Yes !  tu t'es appliqué Tony"
-  "Pour sur, celui là il se boit assis."
 
Ben nous, on est rentré à bord de Banik pour s'assoir.

On avait encore un peu soif alors on a retrouvé dans les fonds deux bouteilles d'une bonne eau française bien de chez nous...
     
  Le kava qui est interdit dans beaucoup de pays dont la France (sauf en Nouvelle Calédonie où c'est également une boisson kanak traditionnelle) contient des anesthésiants. C'est vrai qu'avec le peu que l'on a bu, nous avions la langue et les lèvres comme quand on sort de chez le dentiste qui nous a fait une piqure. Pour sur que celui là, il était d'une autre qualité que ce qu'on trouve dans certain bar à la mode aux Etats Unis.

Le kava est fait à partir d'un petit arbuste, le poivrier sauvage, qui a de grosses racines. Ce sont ces racines qui sont broyées et mélangées avec de l'eau. Ca a un fort gout de terre et c'est amer. Le notre était très amer

 

Nous sommes restés quelques jours à Batnavni. Nous aurions pu y rester des mois si nous n'avions pas une longue traversée d'une partie du  Pacifique à réaliser bientôt pour rejoindre l'Australie. La vie simple des habitants de Pentecôte nous allait bien.

C'est vrai que c'est plus difficile que de mettre le paquet de linge sale dans une machine. Mais de temps en temps, faire la lessive tranquillement, assise sur une pierre et les pieds dans l'eau, ca permet de refaire ce que beaucoup de gens ont oublié: écouter chanter les oiseaux, papoter de tout et de rien avec sa voisine... Ca remet certaine chose en place, ca fait réfléchir à la qualité de la vie dans les cités modernes...

Les villageois de Batnavni nous ont très vite adopté et nous vivions comme eux. Enfin presque  car le soir nous retournions à bord de Banik, profitant d'un certain confort et loin des moustiques.

(*)

 

 

 

Textes et photos :

 
 
  Anik Delannoy
qui n'a pas gouté le kava
  Jean-Baptiste Delannoy
Les photos marquées par (*) sont de:

 

 

Geneviève a été équipière sur Banik en 2010 de Nouméa en Nouvelle Calédonie jusque Darwin en Australie

  Geneviève Liquière    

 

 

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