Après un an et demi
passé en Nouvelle Calédonie, nous reprenons notre voyage autour du
monde. Le premier archipel que nous traversons est formé d'un peu
plus de 80 îles et îlots
qui composent le Vanuatu sur une superficie de 12 200 km². Nous en avons visité quelques unes et nous
avons découvert un pays aux habitants très chaleureux et aux
paysages très divers.
Ile d'Anatom: (voir la carte générale du Vanuatu pour la situer) En guise
d'introduction nous vous invitons à lire la page d'information sur
le mouillage
d'Anatom publiée sur le site de Banik. C'est déjà écrit, nous
n'allons pas nous répéter. Nous donnons ici quelques infos
supplémentaires comme les liens pour télécharger nos traces
(fichiers .GPX) que l'on peut lire avec le programme gratuit
OpenCPN
par exemple.
Formalités:
Nous sommes rentrés sur la pointe des pieds dans le lagon qui est formé par un très large récif qui s’étend loin en mer. C’était la fin de l’après midi. Nous avons mis le pavillon jaune et nous avons mouillé à au moins un mille du village. Si quelqu’un fait des histoires, nous pourrons dire que nous sommes en transit pour la nuit, que nous ne débarquons pas et que l’on reprendra notre route le lendemain matin. Personne n’est venu nous voir, et nous avons passé une excellente nuit au mouillage. L’eau turquoise autour de nous nous invite à la baignade le lendemain matin. Et nous ne résistons pas. Nous aurions du en profiter encore plus intensément, sachant, aujourd’hui que nous sommes en Asie, que ces eaux du Pacifique sont un vrai régal que nous ne trouverons plus avant longtemps. Un peu plus tard dans la matinée, un gars arrive en pirogue, " Vous serez mieux près de notre village, relevez l'ancre et suivez moi…" Quelle bonne introduction pour les premières paroles que nous entendons dans ce pays que nous ne connaissions pas du tout.
Informations complémentaires: au lien donné en introduction. Voici les traces que nous avons enregistrées quand nous sommes arrivés de jour et quand nous sommes sortis de nuit de la zone de mouillage près du village.
Télécharger les fichiers "Traces" qui peuvent
ensuite être utilisés avec un logiciel comme Open CPN.
On voit également sur la carte ci dessus l'important récif isolé de la cote, au Nord de la route. Ne pas longer la cote de trop près.
Les langues aux Vanuatu: Le Vanuatu qui s'appelait alors les Nouvelles Hébrides, a été longtemps sous l'administration mixte du condominium franco britannique. Les français et les anglais ont installé des écoles dans les villages sous leur dépendance. Une partie des habitants a donc appris le français et l'autre partie parle anglais en fonction de l’école qu’ils ont fréquenté quand ils étaient gamins... Quand ils grandissent et se marient, certaines personnes changent de village et vivent dans une communauté qui n’a pas forcément le même enseignement. Une femme pourra par exemple parler français, mais son mari et ses enfants parleront anglais. C’est très curieux. Dans chaque île, ou dans certains villages d’une même île, il y a aussi la langue coutumière qui est toute a fait spécifique au lieu et qui n’est comprise que par les habitants de cet endroit. C’est la langue de tous les jours. Quand les gens se déplacent dans l’archipel, ils utilisent le bichlamar qui est la langue officielle du Vanuatu aujourd'hui et que tout le monde comprend. Les Ni-Vanuatu (habitants du Vanuatu on dit aussi Ni-Van), parlent donc très souvent 3 langues. Aujourd'hui le pays est indépendant. Il s'est transformé en République. Son premier Président, Mr Ati Greorge Sokomanu a été élu le 2 juillet 1980. Le pays s'est doté d'un parlement, d'une assemblée des chefs coutumiers, d'un gouvernement. Mais le Vanuatu reste un petit pays et il accueille facilement les aides des pays voisins notamment de l'Australie et de la nouvelle Zélande toutes proches. De nombreuses équipes médicales, humanitaires, des professeurs, mais aussi des prédicateurs de soi disant églises viennent prendre en charge la santé et l'esprit des habitants. Tous ces gens parlent anglais. Comme partout l'anglais prend le pas sur le français. C'est pourquoi nous avons décidé de nous rendre en mission à Umetch.
Découverte: Le village gaulois d'Umetch A Anelghowhat (ou Anelgaouat) qui est le village principal de l'île, l'usage de l'anglais est très majoritaire. Comme nous sommes français, plusieurs personnes nous proposent de nous rendre à Umetch où les habitants parlent français. Notre enquête nous
fait découvrir l'existence d'un petit village perdu au
Sud de l'ile d'Anatom, à 11 kilomètres d'Anelgaouat. Il n'y a qu'un chemin pour y
aller, en partie en longeant le littoral bordé de plages
somptueuses, en partie en empruntant des petits sentiers qui
contournent les falaises par l'intérieur. Il parait qu'il ne faut
pas plus d'une heure et demi à deux heures pour y aller. C'est décidé, demain on fait l'expédition
d'un aller et retour sur la journée pour aller apporter des cahiers
et des crayons au maitre de l'école qui poursuit contre vents et
marées l'apprentissage de la langue française dans le plus Sud des
villages de l'île la plus Sud du Vanuatu... Le bout du monde. Nous avons laissé l'annexe sur la plage attachée à un arbre par un cordage. Le début du chemin qui passe entre les maisons dans le village est marqué par un triangle sur la carte ci dessous. Pour vous éviter de prendre comme nous le mauvais chemin dès le départ, voici les coordonnées relevées sur notre GPS de rando : 20°14,152' S - 169°46,982' E.
Il faut partir de bon matin si vous souhaitez faire l'aller et le retour (22 kilomètres) sur la journée et aussi passer un peu de temps avec les villageois et les enfants d'Umetch. Le chemin commence par traverser une partie du village et rejoint une route en terre assez large. Nous débouchons rapidement de l'autre coté de l'isthme et il faut déjà traverser une petite rivière. Vous ne pourrez pas choisir la hauteur de la marée au moment de votre passage. Si comme nous c'est marée basse, vous vous contenterez d'enlever vos chaussures et de remonter un peu le short. Sinon vous aurez de l'eau jusqu'à la poitrine et vous porterez vos sacs sur la tète.
Parfois le chemin s'écarte un peu du bord de mer. Il est toujours bien tracé sur le sol car il y a un certain passage à pied qui se fait chaque jour. Les villageois d'Umetch préfèrent tout de même utiliser une pirogue à moteur pour rejoindre Anelgaouat. Il y a des navettes qui sont organisées par la mer entre les deux villages.
C'est dans une zone difficile pour progresser
car pleine de rochers que nous avons rencontré Jocelyne. Elle marche
lentement et quand nous arrivons à sa hauteur nous échangeons
quelques mots. Elle est enceinte et elle sent que ca va bientôt
venir. Elle est en train de rejoindre Anelgaouat à pied, son petit
panier sur le dos, en marchant sur les rochers glissants pour être
près du dispensaire au cas ou... Nous lui disons qu'elle devrait
faire cette route en bateau, elle en a encore pour 2 ou 3 heures.
Elle nous répond qu'elle n'est pas assez riche pour avoir une
pirogue.
4 heures après notre
départ, nous apercevons de loin le village d'Umetch alors que nous
marchons à nouveau le long d'une grande plage de sable gris.
Nous arrivons enfin à l'école. C'est l'heure de manger et les enfants ne sont pas dans la classe que nous visitons tranquillement. Le moins que l'on puisse dire c'est que c'est rustique. Le tableau noir est cloué sur les bambous qui supportent les tôles ondulées des murs brulants de soleil . Les petits bureaux et les bancs sont tous rafistolés, pas un ne repose sur ses 4 pieds.
Mais à leur retour de cantine les gamins étaient ravis de nous accueillir et de chanter pour nous. Surtout ils étaient fiers de nous montrer qu'ils parlent français. Ca nous paraissait complètement incroyable dans cette île du bout du Pacifique habitée majoritairement par des anglophones. On avait un peu l'impression d'aller rendre visite au village, version tropicale, des irréductibles gaulois au temps de Jules César. Anthony, le Directeur de l'école et aussi son unique professeur, nous explique qu'il a fait revenir les enfants dans la classe pour que nous les voyons tous, mais en principe l'après midi ils ne sont pas en cours. Anthony est très conscient de la nécessité pour les jeunes d'acquérir le maximum d'éducation. Ils doivent apprendre à lire, écrire et compter s'ils veulent s'en sortir. Leur meilleur exemple est Jean-Marie Léyé qui est né au village de Umetch, a appris le français en partie ici, et qui a été Président de la République. Aujourd'hui Jean-Marie Léyé est le chef de l'assemblée des chefs coutumiers. Cependant Anthony ne donne ses cours en classe que le matin. L'après midi est consacré à l'agriculture. Les Ni-Vanuatu (habitant du Vanuatu on dit aussi Ni-Van) sont peu pêcheurs et chasseurs mais plutôt agriculteurs. Ils cultivent beaucoup de plantes à racines qu'ils apprécient particulièrement telles que les ignames, le manioc, le taro, les patates douces. Ils ont des vergers (qu'ils appellent les jardins) avec des bananiers, des arbres fruitiers tropicaux (oranges, citrons , pamplemousses...) des ananas et des kasawas. L'après midi Anthony emmène ses élèves dans les jardins de l'école et chacun s'occupe des plantations. C'est aussi l'école de la vie traditionnelle car ils devront tous savoir "cultiver leur jardin" comme disait un certain Voltaire. La production des jardins de l'école servira à nourrir les enfants le midi et le surplus est revendu pour assurer le fonctionnement de l'école qui n'a pas d'autres ressources. Nous n'avions pas assez de cahiers et de crayons pour tout le monde et nous étions un peu embarrassé, nous ne nous attendions pas à ce qu'ils soient si nombreux. Anthony nous dit qu'il en fera des récompenses pour les plus motivés.
Sur la route du retour nous devons marcher plus souvent dans l'eau car la mer est montée. James nous accompagne toujours alors qu'il aurait pu resté dans le village surtout que marcher dans l'eau avec son pied blessé le faisait souffrir.
Repoussant notre anglophobie naturelle (pour moi, c'est comme ça depuis qu'ils ont bruler Jeanne d'Arc, je leur en veux), le lendemain de notre expédition nous sommes allés visiter la high school d'Anelgaouat. Nous leur avons donné notre carte Michelin du monde. Elle est affichée sur le mur protégée par une feuille de plastique. Les élèves étaient étonnés que leur grand pays ne soient représenté que par quelques petites crottes de mouches perdues dans le grand bleu de l'océan Pacifique. Il faut aussi un peu les remettre à leur place ces anglophones... Quelques conseils si vous voulez faire cette visite à Umetch:
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